De récentes recherches effectuées dans le sud de l'Ile-de-France et en Bourgogne ont révélé l’existence, jusque-là non pressentie, d’un style particulièrement original de gravures rupestres. Ces gravures, essentiellement constituées de motifs géométriques accompagnés de représentations schématiques de personnages, de quadrupèdes et de créatures fantastiques, apparaissent sur les parois de cavités rocheuses mais aussi sur de petits blocs de grès déposés sous des surplombs rocheux.
Ces signes peuvent être considérés comme des adoptées ou élaborées par une population ou certains de ses représentants. Une partie des éléments gravés renvoie à des images de la protohistoire tandis que de nombreuses figures restent sans équivalent connu à ce jour.
La religion gauloise ou « religion des Gaulois » est l'ensemble des croyances et des rites propres aux peuples de la Gaule – du moins ceux qui étaient de culture celtique. En raison du rôle restreint de l'écriture prôné par la pensée druidique et de la force de l'acculturation romaine, la religion gauloise reste aujourd'hui difficile à appréhender.
Des anthropomorphes à têtes de cerf, des serpents cornus, des déesses accompagnées d'oiseaux... Se pourrait il que nous assistions en forêt de Fontainebleau à la naissance des futures divinités gauloises ? Certaines gravures m'on interpellé !
Cernunnos est un dieu-cerf, vraisemblablement le grand dieu primordial, dieu de la nature et des forêts, dieu de la fertilité, il est aussi le dieu solaire qui forme avec la déesse Dana (la déesse mère, la lune) le couple qui donna vie à toutes les divinités celtes.
Figure majeure du panthéon celtique, Cernunnos incarnerait le cycle biologique de la nature, reflétant simultanément la vie et la mort, la germination et le dépérissement, à l'image du cerf, l'animal qui le symbolise, lequel perd ses bois en hiver pour les recouvrer au printemps.
L'iconographie, elle, comporte un dossier d'une soixantaine de représentations. Il est notamment représenté sur le chaudron de Gundestrup (récipient cultuel datant du Ier siècle av. J.-C.) et sur le pilier des Nautes de Lutèce (monument élevé par la corporation des Nautes, sous le règne de Tibère entre 14 et 37 après Jésus-Christ). Son iconographie présente certaines caractéristiques fréquentes et/ou récurrentes, cependant, il apparaît parfois sous des formes différentes.
Cernunnos est souvent assis en tailleur, à la manière « bouddhique ». Cette posture est traditionnelle des dieux et des héros celtes représentés en tailleur. On retrouve cette figuration chez les guerriers accroupis découverts en 1860 à Roquepertuse dans les Bouches-du-Rhône. Il apparaît également dans cette position sur certains monuments de Reims, de Vendœuvres, de Saintes ou encore de Sommerecourt. Il peut être debout aussi (Cernunnos de Margerides).
Parmis les scènes iconographiques récurrentes:
- Cernunnos est parfois tricéphale ou à trois visages comme dans la stèle aux trois divinités découverte en 1973 aux Bolards, en Côte-d'Or.
- Cernunnos est tantôt représenté jeune et imberbe, tantôt comme un homme mûr à la barbe fournie.
- Cernunnos est parfois entouré d’animaux, ce qui pourrait en faire un Maître du règne animal. Le serpent à tête de bélier lui est souvent associé. Ce serpent à tête "criocéphale" bénéficiait d'une grande popularité dans toute l'Europe celtique et en Gaule, illustrant l'unité culturelle réalisée par les Celtes au terme de leur expansion. On le retrouve dans les Alpes italiennes, sur les gravures rupestres du Val Camonica dès le IVe siècle, sur le chaudron de Gundestrup, sur les monnaies des Séquanes et des Boïens de Bohême.
- Il est également fréquent qu'une icône de Cernunnos soit associée à celle de la déesse-mère. En témoignent pour exemples les plus étudiés ; le chaudron de Gundestrup, où les deux divinités celtes apparaissent clairement sans doute possible et de surcroît, en relation directe ; sur le monument gallo-romain de Saintes, l'arc de Germanicus, lequel révèle, sculptée sur l'une de ses faces, la représentation d'un homme dénudé, cornu et en posture de yoga, aux côtés d'une femme tenant une corne d'abondance et d'un autre homme muni d'une massue ; tandis que sur une autre face se distingue un homme toujours nu et dans la posture du lotus, néanmoins dépourvu de cornes, toujours aux côtés d'une femme munie d'une corne d'abondance, mais cette fois-ci la scène iconographique est exemptée de ce tiers personnage à la massue. On peut supposer que la relation nouant Cernunnos à la déesse-mère (laquelle apparaît sous les traits de la femme à la corne d'abondance) se résume à un couple mari-femme, et que, par ailleurs Cernunnos est affublé de cornes uniquement en présence du second homme (Cernunnos "porte les cornes"), comme nous l'indique le dernier exemple ; en outre, et dans une moindre mesure, cette relation symboliserait également la science ou la connaissance - Cernunnos orné de ses bois - qui engerme l'esprit - la déesse-mère.
Les Matrones ou Matres (« mères » en celtique et en latin) sont des divinités de la fertilité et de la fécondité, objet d'un culte chez les Celtes et certains Germains. Il est attesté par l'existence de plus d'un millier de pierres votives ou d'autels qui leur sont dédiés, datant du Ier au Ve siècle, et situés sur le Rhin inférieur, en Gaule, dans le nord de l'Italie et en Angleterre.
Les matrones peuvent être représentées seules, par deux ou, le plus souvent, par trois, comme c'est le cas des Matronae Aufaniae en Germanie inférieure. Il est alors possible d'y voir une représentation de la fille, de la mère et de la grand-mère (qui se distinguent non seulement par leur apparence physique mais aussi par le fait que les vierges portent les cheveux dénoués). Les matrones portent des cornes d'abondance, des corbeilles de fruits ou de céréales. Elles tiennent ou allaitent parfois un enfant.
Elles sont donc non seulement dispensatrices de la fertilité du sol, mais aussi protectrices du mariage et de la maternité.
Les déesses Rosmerta, Nantosvelta, Sirona, Nemetona et d’autres. Il est difficile de les distinguer toujours des matres, matronae, divines mères, génitrices des peuples, qui portent des cornes d’abondance, corbeilles de fruits et symboles de fertilité. Et pourquoi pas, Nantosuelta - Théonyme gaulois identifié sur un autel en grès découvert en 1895 au niveau d'un centre cultuel de l'ancienne Pons Saravus (Sarrebourg). L'intérêt majeur de cet autel est, en plus de nous fournir une inscription associant deux théonymes DEO SVCELLO NANTOSVELTE, il nous en propose une représentation en bas-relief. Sucellus et sa parèdre Nantosuelta sont représentés côte-à-côte dans une niche. Nantosuelta qui nous intéresse plus particulièrement ici, est représentée drapée, s'appuyant avec sa main gauche sur un long manche au bout duquel est sculptée une petite maison. De sa main droite, la déesse sacrifie sur un autel. Un grand oiseau (corbeau ?) est positionné sous la représentation des deux divinités.
Des études interprète le nom comme pouvant signifier « vallée chauffée par le soleil », « herbe de la vallée » ou « richesse de la vallée ». Le premier élément, *nanto désigne en gaulois une vallée: Tout comme Nanteau-sur-Lunain (Le nom de la localité est mentionné sous les formes Nantolium en 1198 ; Nantolium supra Lunam en 1350 (Pouillé) ... Composé de nanto-, mot gaulois qui désigne une « vallée », et de -ialo, « clairière » (naturelle ou éventuellement essartée) qui a fréquemment donné -euil dans la toponymie mais ici a évolué en -eau.
Lug ou Lugus est la principale divinité des Celtes, équivalent au dieu irlandais Lugh ou Lú, dit Lamhfhada « Aux longs bras », parce qu'il avait le pouvoir de frapper à distance, et qualifié de Samildanach, c'est-à-dire de « polytechnicien », parce qu'il était inventeur et praticien de tous les arts.
L'importance de Lugos, *Lugus en Gaule et dans les régions anciennement celtes est attestée par un certain nombre de toponymes dont les plus connus sont Lugdunum (Lyon), Laon en France ou encore Legnica en Pologne actuelle. On peut aussi citer Lugano en Suisse (canton du Tessin), ainsi que Lugdunum Convenarum (aujourd'hui Saint-Bertrand de Comminges). On trouve en Gironde trois villages assez voisins dénommés Lugasson, Lugaignac et Lugos (et sa petite chapelle). Comme son homologue irlandais nommé « Lugh Long-bras », il apparaît, dès le IIIe siècle av. J.-C. tant sur des monnaies de la Gaule de l'Est que sur des hémistatères nord-armoricains comme conducteur du chariot solaire avec une main ou un avant-bras de longueur excessive. En tant que tel, il est l'impulseur du mouvement solaire, tout comme le dieu indien Savitar (Savitr), l'impulseur aux grands bras « qui assure à chacun sa place ».
Ces gravures nous parlent de la spiritualité de la fin de l'âge du bronze (de 900 à 800 avant notre ère environ), Il est effectivement tentant de faire un lien avec le panthéon gaulois qui apparaitra bientôt.
Je dois insister, je ne suis ni archéologue, ni historien, seulement passionné et très intéressé par les gravures du massif de Fontainebleau. Je donne ici ma perception.
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